Couverture du zine "féminisme anti-carcéral" de la CLAC

Féminisme anticarcéral

Féminisme 1 févr. 2025

Le féminisme anticarcéral est un mouvement social et un courant de pensée politique. Il est opposé à toutes formes de criminalisation ou d’approche punitive. L'idée centrale est que la libération des oppressions de genre ne se fera pas par de plus lourdes peines.

En cela, il s’oppose au féminisme réformiste dominant aujourd’hui, qui lui est carcéral. Généralement, le féminisme carcéral revendique des condamnations plus fortes. Peines de prison plus longues pour les personnes ayant commis un viol, surveillance judiciaire accrue contre les VSS... Quand on voit la manière dont réponds notre système de justice institutionnelle lors d'agressions, on peut comprendre que certaines personnes pensent spontanément à demander une réponse pénale plus importante. Il n’est pourtant pas étonnant de voir des mouvements de droite se les réapproprier. De plus en plus, la sécurité des femmes est un argument pour prôner plus de moyens pour la police. Des dérives d’extrême-droite en arrivent à des slogans comme « peine de mort pour les violeurs ».

Les approches punitives du féminismes sont devenues mainstream parmi les différents courants du féminisme. Mais il a toujours existé une diversité de positionnement. Lors des luttes pour la dépénalisation de l’avortement, les féministes faisaient majoritairement face à la répression et aux arrestations pour avoir avorté. Bien loin de vouloir plus de police et de peines lourdes. Mais depuis, avec l’avancée des droits, beaucoup de féministes se sont laissées assimiler par le système. Parce que leurs organisations obtiennent des subventions, elles prônent des solutions réformistes. Après 1975, la mobilisation pour reconnaître le viol comme crime confirme ce nouveau paradigme. En se plaçant sur le terrain judiciaire, ce courant du féminisme a contribué au tournant punitif du féminisme.


Or, le féminisme carcéral n’est pas vraiment une solution. S’il reconnaît des violences que l’État ignore, il manque d’intersectionnalité. Et même d’efficacité, car la prison n’aide personne. La logique punitive ne prévient en rien les agressions d’arriver. L’enfermement coupe de la société et de l’éducation nécessaire à ne plus commettre de drame. Au contraire, les conditions pénitentiaires sont telles que les gens y subissent et commettent plus de violences. Si bien que les récidives sont monnaies courantes, puisque la condition des individus a empiré. Quand aux autres solutions punitives, elles ne sont pas meilleures. Les amendes sont des passe-droits de violer pour les riches. La peine de mort est un dangereux pouvoir sans effet dissuasif démontré.

Le féminisme anticarcéral propose d’autres solutions alternatives. L’éducation est bien sûr la plus répandue, parce que la culture du viol est une construction sociale. L’apprentissage du consentement, de la communication, du respect de l’autre sont des stratégies qui sont portées par certaines initiatives féministes. Cercles de paroles, cellules de gestions des VSS, mesures préventives, partage de ressources… Voilà des applications concrètes d'une forme de justice transformatrice, qui est l'un des horizons anticarcéaux possible. D'autres solutions sont un accès aux soins médicaux, à un toit, à de la nourriture de qualité garanti. Aider concrètement les victimes, en fonction de leurs besoins, qui sont bien souvent très matériels. Pour certaines féministes, les alternatives au pénal ne sont pas des solutions et elles pensent l’abolition du système pénal comme liée à un projet révolutionnaire. Il ne peut pas y avoir de véritable solution concrète dans le système capitaliste, qui a besoin des hiérarchies de genre.


Le féminisme anticarcéral actuel rouvre un débat important pour toutes les personnes dominées. La question du pouvoir qu’on laisse à l’État sur nos corps, sur nos vies. Car si certaines victimes tirent effectivement des bénéfices du système pénal, le nombre d'agressions ne diminue pas pour autant. Alors, voulons-nous vraiment de cet outil ? Voulons-nous plus de police, plus de prisons, plus de hiérarchies ayant autorité sur nous ? Tout ça est bien sympa, mais il ne faut pas oublier que le "pays progressiste" dans lequel nous vivons a toujours ciblé en premier lieu les plus précaires par le biais de l'arsenal pénal. Personnes pauvres, racisées, issues de l'immigration et de l'histoire coloniale, femmes, queers, handies. Or notre libération est liée à celle de tous les autres.

Le féminisme anticarcéral, intersection de la lutte contre les prisons et contre l'oppression cishétérosexiste


Avec l'aide de @audeladupenal, @antipatriarcame et Gwenola Ricordeau

https://youtu.be/uqOqz8ZRmiU

https://blog.potate.space/feminisme-anticarceral/

#féminisme #prison #anticarcéral #abolitionpénale

Sources et ressources :

Français :


Antipatriarcame - LE FEMINISME CARCERAL : un féminisme soumis aux institutions.

https://www.youtube.com/watch?v=TiVY46y0Oa4


Le féminisme anticarcéral - Entrevue avec Lux

https://www.clac-montreal.net/fr/node/792


Dégenré-e - Femme et taule (3 épisodes)

https://www.radiorageuses.net/spip.php?article54


Lilith, Martine et les Autres - Pour elles toutes. Femmes contre la prison » : Interview de Gwenola Ricordeau

https://www.radiorageuses.net/spip.php?article1113


Avorter, Histoire des luttes et des conditions d’avortement des années 1960 à aujourd’hui

https://infokiosques.net/spip.php?article570


Encore plus de ressources :

https://www.antipatriarcame.com/2023/01/23/ressources-a-propos-de-la-prison/

Musique : Samuele - "La Sortie"

https://youtu.be/4OaB3zW_sAA

Mots clés

Erie Batril

Anarchiste. Pronoms indéfinis. Ultra-vulgarisation politique http://www.youtube.com/@ErieBatril