Quelle différence entre l'entente de voix liée à la psychose et celle qui est perçue comme spirituelle ou non-pathologique ?

Traduction 24 juil. 2022

Source: https://www.madinamerica.com/2022/07/spiritual-voice-hearing-compare-psychosis/

Auteur:

Traducteurice: Loustoni

Publié initialement: 15 juillet 2022

Des chercheureuses désireuxses de comprendre les différentes expériences vécues par les personnes qui entendent des voix ont récemment publié leurs conclusions dans le Schizophrenia Bulletin (lien ici) . L'équipe de recherche, dirigée par Peter Moseley de l'Université Northumbria au Royaume-Uni, a identifié des différences significatives dans les expériences des personnes qui entendent des voix dans un cadre vécu comme non pathologique ou spirituel et celles des personnes qui attribuent leurs voix à la psychose. Les auteurices écrivent:

"En plus de confirmer des résultats précédents, comme le fait que les groupes non cliniques ont des niveaux de détresse plus faible et l'impression d'avoir un plus grand control, nous avons également fourni des preuves inédites d'autres différences plus subtiles, notamment un risque moindre de ressentir des voix provenant des frontières perceptuelles et une intégration accrue des perceptions en un seul Moi."

Ces dernières années, l'étude de la multiplicité des vécus des entendeureuses de voix a suscité un intérêt croissant dans le cadre d'un mouvement visant à dépathologiser ces expériences et à comprendre les manières distinctes et diverses dont les gens vivent ces expériences. Par exemple, Tanya Luhrmann de l'Université de Stanford a identifié plusieurs représentations de l'entente de voix et l'importance des différences culturelles dans les vécus des entendeureuses de voix.

Les recherches ont également montré que le contexte, la langue, l'oppression, la stigmatisation sociale et la façon dont les gens donnent du sens aux voix influencent leur expérience. Ces facteurs, entre autres, peuvent déterminer si les voix sont vécues comme hostiles ou bienveillantes, ou si l'expérience est source de détresse ou de bien-être.

Les entendeureuses de voix et les personnes psychotiques qui ont remis en question les théories biomédicales de la psychiatrie ont développé des ressources entre pairs. Par exemple, les Hearing Voices Groups (NDT: Réseau français sur l'entente de voix en France) opèrent au niveau international pour soutenir d'autres personnes ayant vécu ces expériences. Des recherches ont montré que ces groupes de soutien par les pairs améliorent le bien-être de leurs membres. L'efficacité de ces groupes est liée à leurs valeurs : l'autodétermination, la réticence à remettre en question les explications données par les personnes sur leurs perceptions, le respect des multiples façons de les comprendre, le fait de favoriser la curiosité sans jugement, une organisation horizontale et des relations authentiques au sein et en dehors du groupe.

Pour explorer les différences entre les personnes qui éprouvent de la détresse lorsqu'elles entendent de la voix et celles qui n'en éprouvent pas, les chercheureuses ont interrogé 26 personnes qui ont un rapport spirituel et non clinique à leur entende de voix (NDT: Non Clinical Voice Hearers) ainsi que 40 patient-e-s psychotiques. Les participant-e-s devaient répondre à huit questions générales et ouvertes proposées par une équipe pluridisciplinaire épaulée par des patient-e-s expert-e-s.

Les entretiens ont été menés par deux chercheureuses formé-e-s aux entretiens cliniques et phénoménologiques. Ils ont également mis en place une évaluation standardisée pour identifier la fréquence, la durée, le contexte, l'intensité sonore et d'autres caractéristiques des voix entendues par les participant-e-s. Les chercheureuses ont ensuite analysé les entretiens en classant le contenu et les thèmes émergents.

Les thèmes suivants ont été identifiés :

Modalité et spatialité

‌‌Les entendeureuses de voix du groupe non-clinique (Non Clinical Voice Hearer) ont plus souvent déclaré avoir d'autres expériences sensorielles telles que des expériences gustatives et tactiles que les personnes psychotiques interrogées. Tous les NCVH ont également déclaré avoir des visions ou des visualisations dans leur esprit. Si les NCVH et les personnes psychotiques ont déclaré percevoir des voix internes et externes (provenant de l'intérieur de leur esprit ou de l'extérieur), ce dernier groupe a également ressenti des voix limites (ou des voix qui proviennent d'espaces délimitant des frontières comme les portes ou les murs).

Les NCVH étaient plus susceptibles de faire état de voix ressemblant à des pensées ou de voix pouvant être confondues avec leur propre voix intérieure, mais la plupart ont fait l'expérience de voix entendues ressenties comme extérieures.

Contrôle et évolution au cours du temps

Les NCVH étaient plus susceptibles de rapporter qu'iels étaient capables d'influencer leurs voix volontairement que les personnes psychotiques. Cette influence sur les voix a été décrite par les NCVH comme variable en fonction du temps mais vécue comme un contrôle accru des voix et d'autres expériences sensorielles. Peu de participant-e-s dans les deux groupes ont rapporté des changements dans les caractéristiques des voix, et le groupe non-clinique était moins susceptible de rapporter des changements dans le nombre de voix qu'iels entendaient, alors que cela était plus fréquent chez les personnes souffrant de psychose.

Emotions, Rôle et Contenu

Les NCVH étaient plus susceptibles d'entendre des voix qui transmettaient des messages positifs ou évoquaient des émotions positives; elles apportaient à la personnes en faisant l'expérience des connaissances et de la sagesse, avaient un discours plus simple et étaient souvent les voix "de personnes de la vie réelle". En revanche, les personnes psychotiques étaient plus susceptibles d'entendre des commentaires évoquant des émotions négatives de la part de voix abusives, violentes ou autoritaires. Les deux groupes ont signalé des voix personnifiées ou ayant des caractéristiques propres.

Contexte social et interpretation

Les personnes psychotiques expliquaient souvent leurs symptômes comme étant dus au stress, tandis que les NCVH étaient plus susceptibles de donner un sens surnaturel ou spirituel à leurs voix. Les deux groupes ont souvent décrit leurs expériences comme étant courantes dans leur famille. Les personnes ayant vécu une psychose étaient plus susceptibles de rapporter que l'entente de voix avait un impact négatif sur leurs relations interpersonnelles, leur sommeil et leurs idées suicidaires. Ces expériences étaient moins souvent rapportées par les NCVH, qui ont mentionné que leurs voix faisaient partie de leur identité et de leur culture. Les auteurices étaient conscient-e-s que des influences sociales pourraient expliquer ces différences entre les groupes. Les clinicien-ne-s pourraient influencer la façon dont les patient-e-s psychotiques comprennent leurs voix comme étant le résultat du stress, tandis que la compréhension des NCVH est façonnée par leurs groupes socioculturels.

Cet article a reproduit les résultats d'études précédentes et a proposée de nouvelles perspectives sur les différences dans les façons dont peuvent être vécu l'entente de voix. Par exemple, des différences clés entre la psychose et la NCVH, telles que les voix limites, les visions et les hallucinations ont put être mise en avant. Ces résultats constituent une preuve supplémentaire des similitudes et des différences entre différents groupes d'entendeureuses de voix. L'étude du contrôle des voix pourrait aider à développer des stratégies pour réduire la détresse ressentie par certains types d'entendeureuses de voix.

Mots clés

Al Loustoni

iel/ellui Punk psychédélique exilé-e à la campagne. insta: @al_loustoni